La Clau
La prostitution en appartement reste taboue en Roussillon

En octobre 2010, l’inauguration du « Paradise », véritable industrie du sexe construite dans la commune de La Jonquera, à 48 km de Perpignan, avait suscité de nombreuses réactions. En Roussillon, le Mouvement Démocrate, dénonçait une « exploitation de la femme », conçue comme une « marchandise ». Pour sa part, la vice-présidente du Conseil Général des Pyrénées-Orientales, Ségolène Neuville, résumait en janvier dernier la prostitution en maisons closes, en réalité généralisée en Espagne, ou encore en Belgique, à la seule « frontière » catalane. Une seule zone, voisine du Roussillon, résumait ainsi un ensemble de situations avérées. En février, le tour est venu de la députée socialiste Danielle Bousquet, élue du département des Côtes d’Armor, d’évoquer La Jonquera, où « 90% des clients viennent du Sud, de Marseille à Perpignan ». Dans une certaine ingérence, Mme Bousquet a suggéré dans la foulée de pénaliser les clients, quelle que soit leur nationalité.

En dehors de tout débat éthique, ces prises de position sont le fruit de la découverte tardive de réalités évidentes, et banalisées, car le sexe tarifé, y compris en masse, existait déjà en 1950, comme en 1990, notamment dans la ville de Figueres, avec déjà une consommation accrue de Catalans du Nord. Mais une certaine classe politique évite sa propre proximité, celle de la quinzaine d’annonces suggestives publiées quotidiennement par la presse majoritaire, dont les Journaux du Midi, ainsi que plusieurs journaux d’annonces gratuites des Pyrénées-Orientales. Sans équivoque possible, ces services sont généralement proposés dans une rubrique intitulée « détente ». Ces derniers jours, une jeune femme y invitait les hommes à la rejoindre à Canet-Plage, tandis que se signalait une « dame très sympa » qui « reçoit pour câlins » à Perpignan intra-muros, tout comme une autre professionnelle, qui sollicitait les clients en « besoin de lâcher prise ».

Cette prostitution de fait en Roussillon, maquillée par l’hypocrisie des mots, est évidemment identique à celle de La Jonquera, la dimension de masse en moins. Sans détails lubriques, ni tarifs, dans une discrétion toute française, elle se présente parfois même sous des formules romantiques, mais la réalité reste la même en matière de traitement réservé à l’identité de la femme. Cependant, les traditions culturelles sud-catalane et espagnole, qui consistent à appeler un chat un chat, divergent du style hexagonal, dans l’euphémisme et la suggestion. La persistance, voire le développement du sexe à péage dans les Pyrénées-Orientales, à la faveur de la crise, soulève des questions, en bonne partie identiques à celles que suscite la Catalogne du Sud.

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