La Clau
Il y a 10 ans, Perpignan manifestait contre la région Septimanie

Le compte à rebours vers la fondation de la nouvelle région Languedoc-Roussillon / Midi-Pyrénées, au 1er janvier 2016, suscite des débats. Le recentrage des compétences régionales à Toulouse inquiète Montpellier, malgré un pacte noué en décembre 2014 à Collioure par les actuels présidents Damien Alary et Martin Malvy. L’indifférence populaire et citoyenne prédomine autour de ce sujet, mais la dénomination du futur périmètre intéresse. Le sondage produit en septembre par la Dépêche du Midi, dans les 13 départements concernés, a été relativement boudé ailleurs, mais a largement interpellé le Pays Catalan, qui lui a fourni la moitié des participants. Il en ressort que le nom «Occitanie» est le premier souhaité, à 23%, suivi d’«Occitanie-Pays Catalan» à 20%. La question du nom, qui ne saurait résumer les futures stratégies régionales, reste importante, car l’identification à l’extérieur, notamment à l’international, devient nécessaire à chacune des 150 régions européennes.

«Sud de France» ne plaît pas

Les suggestions «Sud de France» et «Septimanie», contenue parmi l’éventail de noms proposé par la Dépêche du Midi, restent minoritaires ou très minoritaires selon les départements. La première a succédé à la seconde dans la stratégie développée par la région Languedoc-Roussillon, sous le premier mandat de Georges Frêche. La tentative de «Septimanie», parce qu’elle englobe les Pyrénées-Orientales dans un ensemble inconnu, a jeté 8000 personnes dans la rue, à Perpignan le 8 octobre 2005. Il y a tout juste 10 ans, une clameur citoyenne s’élevait contre la dilution, mais sans proposition alternative et sans véritable suite coordonnée. Depuis début 2015, le collectif SEM (nous sommes) propose un statut territorial spécifiquement pour les Pyrénées-Orientales, conçues comme Catalogne du Nord. Plutôt marqué à gauche et principalement catalaniste, ce groupe rejoint en cela la formation souverainiste française Debout la France. Celle-ci, marquée à,droite, défend un statut de «Collectivité territoriale renforcée» apte à «soutenir un «projet d’avenir dans l’intérêt général». Cette Collectivité Territoriale Unique, dotée des compétences du Département et de la Région, est également le projet, depuis 1993, du parti Unitat Catalana, représenté à la mairie de Perpignan.

Pays Catalan, le caillou dans la chaussure

La question du nom est compliquée pour le ministère de l’Intérieur, seul dans sa décision, car les Pyrénées-Orientales sont le seul territoire non occitan et non languedocien parmi les 13 départements de la grande région. Malgré sa débâcle socio-culturelle qui l’a éloigné de la Catalogne du Sud, ce Pays Catalan voit ses signaux identitaires se développer très visiblement depuis les années 1990. Sans revendications politiques, des entreprises, services, collectivités publiques et associations en tous genres utilisent le drapeau catalan dans leurs chartes graphiques et dans leurs intitulés. Cette évolution est connue des cabinets décisionnaires, chargés de créer ou de choisir le meilleur nom global, la meilleure marque territoriale pour Languedoc-Roussillon / Midi-Pyrénées. Le ministère devra arrêter une position de consensus pour ne pas réveiller la grogne de la pièce catalane du puzzle, économiquement et politiquement faible, mais identitairement plus forte que les autres. En ne la représentant pas, il se risquerait, alors que la Catalogne du Sud tutoie l’indépendance, à rétablir l’habitude de regarder vers le Sud, plus que vers le Nord. 10 ans après, le mouvement anti-Septimanie reste la référence contemporaine d’une mobilisation douce mais déterminée, dans un territoire qui n’existe souvent que dans l’adversité.

EV

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