La Clau
Perpignan municipales: Romain Grau prévoit «15 mesures dans les 100 premiers jours de mandat »

La Clau : Romain Grau, qui vous entoure ?

Romain Grau : Depuis six mois, j’ai réuni toutes les forces politiques constructives pour relancer Perpignan : la République en Marche, le centre avec le Mouvement Démocrate (MoDem) et l’Union des Démocrates et Indépendants (UDI) et la droite constructive avec le mouvement AGIR. Le Parti Radical de Gauche nous offre une approche sociale intéressante et le mouvement politique départemental Oui au Pays Catalan nous garantit une assise solide. Je tiens particulièrement à m’associer à la société civile, incarnée notamment par Laurent Sobraquès, à la tête d’une importante entreprise agro-alimentaire, à Hélène Colls, commerçante de renom en centre-ville, à Pierre Perucho, médecin-anesthésiste au centre hospitalier. D’autres personnalités nous rejoindront. Ce qui nous unit tous c’est la volonté de relever Perpignan et d’en refaire une ville pimpante dans laquelle il fait bon vivre. Je tiens à redire une conviction que j’ai chevillée au corps depuis des années. Sans une alliance, rien ne serait possible, car la division empêche les projets audacieux pour la ville. Sans cette ample union, il ne peut y avoir d’ambition dans notre ville. Les écuries politiques qui agissent seules et qui n’ont pas su rassembler vont tout droit vers l’échec, non pas simplement électoral, mais pour notre ville. Nous devons sortir des querelles de chapelle dans lesquelles notre département s’est endormi. Prenez l’exemple de disputes structurelles entre Ville et Département, qui nous ont conduit à manquer d’ambition et de pertinence. Aujourd’hui, la Ville de Perpignan est dans un tel état qu’il nous faut savoir dépasser largement ces vieux clivages pour construire notre nouvelle ambition.

Le “big bang Macron” a changé quelque chose ici ?

Sans aucun doute ! Sur le plan politique d’abord, indéniablement, avec l’émergence d’un courant politique central, structuré et rassembleur. Sur le plan des politiques publiques et des réformes, je prendrai deux exemples, la politique économique et l’éducation. Sur le plan économique, grâce à la volonté réformatrice du président Macron et de la majorité, il a été possible de baisser structurellement les cotisations sociales, de réformer le droit du travail en donnant plus de lisibilité et de sécurité aux employeurs, d’accroître les moyens au service de la formation professionnelle initiale (l’apprentissage) et continue. Ainsi, depuis l’élection du Président Macron, le chômage baisse structurellement et la France est en train de soigner ce qui représente son principal talon d’Achille depuis plus de 40 ans, le chômage de masse. Dans le département, le chômage a ainsi baissé de 1 point au trimestre dernier. Le dédoublement des classes en zones prioritaires en classes de CP et de CE1, a été une excellente mesure permettant de renforcer le rôle d’ascenseur social joué par l’école de la République. Sans cette école, des jeunes de familles modestes, comme je l’étais, sont privés d’égalité des chances. Aujourd’hui, les résultats scolaires s’améliorent grâce au dédoublement dans de nombreuses classes du département et nous sommes en train de faire reculer un autre fléau français, l’illétrisme. Les conditions d’une embellie générale sont en place. Le Président s’est entouré d’une équipe très large, qui a eu le courage de tout remettre à plat pour obtenir des résultats. C’est exactement ce que je veux pour Perpignan.

Quelle est l’utilité d’être un proche du pouvoir actuel ?

Ma proximité avec le pouvoir à Paris peut représenter une opportunité pour faire avancer les dossiers du département. Je l’ai déjà fait depuis que j’ai été élu député. Par exemple, cela a permis l’engagement définitif du gouvernement pour la construction du second centre pénitentiaire de Perpignan il y a quelques mois, tout comme le maintien du concours du CAPES de catalan. Cela facilitera d’autres avancées, je pense notamment à notre évolution économique et notre politique de transports. Avoir nos entrées à Paris est profitable. Je suis un « Marcheur », oui, mais j’ai eu une vie avant cela. Mes adversaires n’ont de cesse de le répéter. La première carte de parti que j’ai prise est celle du Parti Radical Valoisien. En 2017, soutenir Emmanuel Macron était une évidence, en accord avec mon identité centriste et radicale-socialiste. Je suis à l’aise dans mes convictions, qui sont celles de la recherche de résultats avec pragmatisme, non l’application d’un logiciel dogmatique. Il fallait cesser de traînasser, de perdre du temps et de regarder passer les trains de la mondialisation au niveau national. L’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir a entraîné un train de réformes impressionnant. Il fallait bouger la France pour sortir de nos archaïsmes. Donc oui, je suis fier de ce qui est fait au niveau national par la majorité à laquelle j’appartiens. Mais oui, j’ai conservé au sein de cette majorité mon identité catalane sans problème. Je pense que le défi pour notre Ville aujourd’hui n’est pas de dupliquer ce qui se fait ailleurs mais plutôt de se donner les moyens de faire décoller notre Roussillon en sachant attirer les subsides de l’Etat ici.

Quels sont vos projets pour la ville ?

Je propose 15 mesures dans les 100 premiers jours de mandat, car il faut agir avec une certaine urgence pour bouger la ville. Nous mettrons en place le transport gratuit pour tous, car il faut désengorger la ville pour la rendre plus respirable, moins bruyante et plus moderne. Le stationnement sera gratuit la première heure tous les jours, gratuit le samedi toute la journée et le mercredi après-midi. Il nous faut ranimer le cœur de ville. Chaque quartier aura son poste de police municipale. Perpignan doit être une ville sûre. Bien sûr, je détaillerai dans les mois à venir, avec mon équipe, un programme ambitieux pour notre cité, qui doit redevenir attractive. Il n’est pas normal qu’une ville méditerranéenne voit depuis 10 ans le prix de l’immobilier baisser. Nous devons réagir fortement. Si on veut obtenir une amélioration le plus vite possible, c’est à dire augmenter la fréquentation en ville et refaire société, il faut mettre le paquet.

« Refaire société », carrément ?

Oui. A Perpignan, il faut reconstruire du lien social, en multipliant les occasions de se retrouver, lors d’événements publics. La proximité et le volontarisme font partie de l’ADN de la liste que je présenterai en mars prochain. La proximité et le volontarisme seront les clés d’une renaissance de Perpignan. Nous devons instaurer ce qui fait, depuis des années, l’épine dorsale de mon engagement politique à Perpignan, c’est à dire une société de confiance. Nous devons nous refaire confiance et recoudre les liens, en faisant appel aux politiques publiques dont la mairie et l’Etat ont la compétence. Pardonnez-moi cette évidence : la confiance est le contraire de la méfiance. Pour nous développer économiquement et prospérer, il faut de la confiance, que l’on obtient en mettant en place un contexte. Cela fait partie des enjeux qui rendent le rôle de maire extrêmement important et exaltant. Perpignan est une ville sereine lorsqu’il y a foule en coeur de ville, par exemple le samedi, qui est une parenthèse hebdomadaire. La Ville mérite de retrouver confiance en elle et les Perpignanais méritent de se refaire confiance dans tous nos quartiers, du cœur de ville ou de la cité Clodion au Champ de Mars, du Moulin à vent à Saint-Jacques ou à Saint Assiscle ou à Saint Martin. Aucun quartier ne doit être oublié dans cette tâche. Dans ces secteurs, le logement précaire maintient les conditions d’une forme de malheur quotidien, j’en suis bien conscient. Le travail à faire est immense. Restaurer la confiance, c’est faire en sorte que les élus retrouvent avec constance le chemin du terrain, du contact avec les citoyens. Restaurer la confiance, c’est avoir le désir de transformer la réalité tout en rassemblant, et non pas de souffler sur les braises comme le fait l’extrême droite à la moindre occasion en divisant les Perpignanais entre eux en fonction de leurs confessions et de leurs origines.

Quel maire imaginez-vous devenir ?

Un maire catalan qui parle à tout le monde, qui affirme des convictions solides tout en écoutant les autres et en apprenant d’eux. Bien malin celui qui prétend avoir les solutions à tous les soucis. Mais il faut prendre Perpignan à bras-le-corps et non à 20 ou 30 % ! Il ne faut pas non plus utiliser la ville à des fins autres que pour elle-même.

Vous faites allusion au Rassemblement National ?

Oui, je dirai même le Front national, car le changement de nom est une tactique cosmétique. L’extrême droite souhaite ajouter notre ville à son tableau de chasse, à côté de Fréjus, Hénin-Beaumont et Béziers, mais c’est tout. Son intention n’est pas locale, elle est publicitaire. Son candidat est habile, il peut bluffer des électeurs, mais certains ont compris qu’il nous voit comme un marchepied. Son parti a tout intérêt à détruire l’espoir et la confiance. Il développe à son profit l’idée d’un climat anxiogène, un taux de chômage proche de 40% dans certains quartiers et une image négative de notre ville. Il a besoin que tout aille mal et il insiste assez subtilement pour exagérer un climat communautaire tendu, avec des insinuations sournoises. Nous ne devons pas être dupes, mais il ne faut pas non plus nier le réel.

Le Rassemblement national a un avantage sur vous : son candidat passe sur BFMTV !

C’est exact, mais son candidat n’habite pas Perpignan, mais Millas. Sa candidature repose sur la location administrative d’un appartement. C’est quand-même spécial de vouloir représenter une ville dont on n’est pas habitant ! Il reste un touriste de la politique. Je comprends qu’il ne partage pas le passé ni l’histoire du Roussillon, mais il ne partage pas non plus les inquiétudes au jour le jour et les espoirs de Perpignan, il ne fait pas corps avec la ville.

Au fond, vous êtes le seul candidat d’ici mais Louis Aliot s’annonce libre, sans étiquette…

Franchement, qui croira qu’un homme de 50 ans au passé politique aussi marqué peut changer brusquement d’idéologie ? Louis Aliot a été le directeur de cabinet de Jean-Marie Le Pen et directeur de campagne de sa fille en 2012. Il a été élu en Midi-Pyrénées, puis en Languedoc-Roussillon, ou encore député européen. Il reste membre du bureau national de son parti, dont il a été vice-président… et chez nous, il s’est positionné sur la circonscription 1, puis sur la circonscription 2. Ce nomade du mandat n’a aucun intérêt sincère pour notre ville. Il a partagé la vie de la présidente de son parti, il est ultra-étiqueté et il se veut sans étiquette ! Moi, mon seul parti, c’est les Perpignanaises et les Perpignanais. Mais je ne veux pas leur mentir : je suis député de la République en Marche, je ne vais pas dire à Perpignan que je ne connais pas la République en Marche, alors qu’à Paris j’en suis membre. Finalement c’est ce que fait M. Aliot. Très simplement, cette personne veut accrocher une ville de plus de 100.000 habitants au tableau de chasse du Front national. Mais pour ma part, je ne veux pas que Perpignan devienne un laboratoire d’expérimentations pour l’extrême-droite.

Louis Aliot fait ici un copier-coller du contexte national ?

Sans aucun doute ! Mais les élections municipales ne doivent pas être la reproduction du combat politique national. Elles doivent reposer d’abord un projet local, donnant des réponses concrètes pour l’avenir d’un territoire et des citoyens. Vous savez, à Perpignan, les problèmes ne sont pas davantage «En Marche» qu’ils seraient d’un autre parti. Nous devons juste nous atteler à trouver des solutions pertinentes. Ces solutions doivent avoir été taillées sur mesure et non être issues d’un prêt-à-penser politique national. Une équipe municipale doit travailler avec tout le monde, dans l’intérêt général, pour faire aboutir des projets. Un maire est une personne qui doit décider en totale indépendance, sans demander l’avis d’un appareil partisan pour le bien de sa ville. Mon équipe comporte de nombreuses personnes non encartées. Cette équipe est aussi composée de gens issus du centre, de la gauche ou de la droite. Cela fera la force de cette équipe quand elle sera à la place de la Loge, au service d’une nouvelle ambition et d’une renaissance pour Perpignan. A l’inverse, les partisans de la guerre des tranchées idéologiques ne peuvent pas insuffler ce volontarisme qui fait tant défaut pour relever la ville, car ils sont préoccupés par les victoires électorales sans lendemain.

Les prisonniers politiques catalans soulèvent un questionnement international… Qu’en pensez-vous ?

J’en suis ému, d’autant plus que j’en connais plusieurs. Je pense à leurs familles et à leurs enfants. On ne peut pas résoudre un problème politique avec la prison. Alors, soyons lucides. Perpignan ne peut pas importer une problématique épineuse dont on ne peut pas exporter une quelconque solution. Cette situation me touche énormément. J’ai beaucoup d’amis dans la Generalitat. J’ai un plaisir immense à cultiver mon identité roussillonnaise qui est forcément catalane. Donc, je regarde ce qui se passe à Barcelone avec beaucoup d’attention.

Entretien Martin Casals

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