De nombreux observateurs aux Etats-Unis annoncent déjà la fin de la presse écrite, qui, selon le centre d’étude américain Pew, est devenue la 3ème source d’informations aux Etats-Unis, derrière Internet. Les plus grands groupes américains sont durement touchés par la crise et un modèle économique déjà mort : le groupe Tribune, éditeur du Los Angeles Times et du Chicago Tribune, s’est placé sous la loi anti-faillite américaine pour continuer à paraître. Même le mythique New York Times est touché, son éditeur le groupe Times Company en ayant hypothéqué le siège new-yorkais de 52 étages. Newsweek, USA today ou l’agence de presse Associated Press licencient au delà de 10% de leur effectif. En cause, la chute des revenus publicitaires et l’hémorragie des lecteurs, inéluctable. Ce phénomène touche d’ailleurs déjà l’Europe, où, mis à part les journaux sur-subventionnés par les collectivités publiques qui feront encore un peu illusion, beaucoup de grands groupes ont entamé une série de plans dont on ne connaît pas l’issue. En Pays Catalan, le journal l’indépendant a perdu de l’argent en 2007, et 2009 pourrait bien être le tombeau de la presse écrite. Pire encore, même si la télévision reste encore la première source d’information, elle commence à perdre pied face à l’érosion du marché publicitaire et face au web, notamment dans les couches les plus jeunes de la population. En prenant l’exemple français, comment expliquer autrement le transfert publicitaire des chaînes publiques vers les chaînes privées, offert sur un plateau par le président Sarkozy ?

L’explosion des médias, un danger pour la démocratie

L’absence de modèle économique fiable sur Internet ne permet pas d’envisager sereinement le transfert des grands titres sur la toile, ce qui ne rend pas du tout impossible, à terme, la fin pure et simple du mass media, avec ses cohortes de journalistes au sein des rédactions. Si, encore une fois, le politique n’est pas mis à contribution, comme le laisse présager les Etats Généraux de la presse en France, ce scénario pourrait bien se réaliser, laissant comme uniques sources d’informations les « niches » d’infos Internet et l’info individualisée, c’est à dire la fin pure et simple du média comme acteur et constructeur de l’espace démocratique qui régit nos sociétés. Car le risque est bien là, par le bornage de l’espace politique dans lequel le citoyen peut se référer indépendamment du pouvoir pour fixer son choix. L’élection américaine a déjà laissé entrevoir le phénomène pendant lequel le dialogue direct du candidat Obama sur Internet avec le citoyen a remplacé la conviction des rédactions. Mais quid de l’évaluation, du contrôle, de l’analyse indépendante de l’action publique ? Ce nouveau modèle correspondrait très bien au renforcement de l’individualisme et à la globalisation aboutie de la planète, mais, pourtant, le modèle participatif type Web 2.0 jugé comme le must de la démocratie pourrait être à terme l’élément qui l’empêche de s’exercer en détruisant l’espace sur lequel elle peut s’exercer. En l’absence de corps intermédiaires de quelque nature que ce soit, le rapport direct pouvoir-individu ouvrirait la voie à un totalitarisme des plus efficaces. Un nouveau modèle médiatique reste à inventer.

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