La Clau
The xx, le triomphe de la musique de la crise

C’est un cliché journalistique inévitable : chercher par tous les moyens à raccrocher la musique à l’actualité et identifier dans la culture un témoin de l’époque. L’année dernière, et particulièrement pendant les fêtes de fin d’année, les critiques musicaux ont fait le lien entre les jeunes Londoniens de The xx et la crise. Ces Anglais sont la révélation musicale de 2009, année de la crise… The xx est donc une musique de crise. Pourtant, les quatre britanniques ne revendiquent rien. Certes, leur premier album a, comme beaucoup d’autres, été réalisé avec peu de moyens (le clavier aurait été acheté sur eBay) et les ventes de disque sont en chute libre. Cela n’en fait pas pour autant le symbole de la dépression économique.

Ni leaders ni messagers de leur temps

Romy, Baria, Oliver et Jamie font de la musique et c’est tout. Ils n’ont pas de message, ne sont pas les porte-parole d’une génération, encore moins les leaders d’une nouvelle pop britannique. Très effacés, les membres de The xx n’ont que leur musique à mettre en avant, et personne ne s’en plaindra. Leur premier album s’appelle d’ailleurs sobrement « XX ».

C’est une musique sobre et minimale. Un clavier, une basse, une guitare et deux voix : l’une masculine, l’autre féminine. C’est aussi 38 minutes – seulement – d’une musique crépusculaire, voire nocturne. Dès la première chanson, le sort est jeté : The xx ne joue pas dans le rock dur. Il mélange plutôt des guitares douces, des voix mielleuses et sensuelles qui ressemblent de près à des murmures lointains, bercées par une touche électronique et jazz, et un rythme obsédant, atmosphérique… voire planant ! La touche pop est sombre, presque étrange. Les silences et les pauses ont la part belle dans cet album. The xx chante à propos de soirées passées à regarder des cassettes VHS, de cœurs brisés et/ou recollés, décrit des ambiances intimes, à mi-chemin entre l’intimité confortable et la morosité. Une chanson s’appelle « Schelter ». Et c’est exactement cela, leur musique est un refuge, un repli sur soi. On se laisse emporter par « Fantasy » et envoûter par « Infinity ».

Selon le guitariste et réalisateur Jamie Smith, 19 ans, le son du trio est le résultat du mélange des profils musicaux bien distincts de chaque membre. «Je viens plutôt de la soul (…) Je suis passé au hip-hop parce que la soul s’y trouve échantillonnée. Ensuite, j’ai découvert l’électronique, le dubstep et tout ça. Oliver (chant et basse) est plus du type R&B. Quant à Romy (chant et guitares), elle vient du folk ainsi que du rock lourd à guitares».

Timidité maladive

L’histoire des quatre Londoniens n’a rien d’incroyable. Inutile de leur chercher un destin exceptionnel ou sulfureux. Pas de frasques à la Pete Doherty ou d’excès comme leurs aînés Blur ou Oasis. Les membres du groupe ne font pas vraiment parler d’eux dans les tabloïds anglais. On connaît d’ailleurs peu de choses sur leur personnalité, puisqu’ils fuient les interviews et sont habités d’une timidité maladive. On sait simplement qu’ils se sont rencontrés à l’âge de 15 ans dans un collège de la banlieue de Londres. Ils ont aujourd’hui 18 et 19 ans et font penser à n’importe quelle bande de jeunes adolescents à l’air hagard. Look sombre, noir et blanc, ils ont l’air d’enfants perdus
Ayant tout juste lancé son premier album éponyme à l’échelle internationale, The xx prévoit de passer l’année 2010 en tournée, après quoi il se mettra au travail pour enregistrer une suite, certainement dans la lignée de ce premier album. Leur voyage nocturne est loin d’être achevé tant The xx semble parti pour installer durablement sa musique froide et sensuelle dans la nouvelle décennie.

The xx « XX ». XL Recordings – Paru le 29 septembre 2009.

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