La Clau
Lesbienne, grosse et féministe : Beth Ditto, de Gossip, secoue le rock

« Tout cela ne va pas durer, il n’y a qu’une Madonna, qu’un U2 ». C’est Beth Ditto, chanteuse de Gossip, qui parle. Le disco punk XXL n’est pas qu’une image facile à retenir.

Personnalité hors norme et phénomène dans tout l’Europe, la nouvelle icône rock électro a le triomphe modeste. Evidemment, elle n’a pas rempli le Stade Olympique de Barcelone comme Madonna en juillet dernier. Elle n’a pas non plus attiré 80 000 personnes au Camp Nou comme l’a fait U2 fin juin. Pourtant c’est bien son passage avec son groupe Gossip au Razzmataz, LA salle en pointe de la scène underground barcelonaise, qui a marqué les esprits cet été dans la capitale catalane. Et pas franchement le grand show à l’américaine d’une Madonna fatiguée.

Ce 13 juillet, des milliers de « modernos », les branchés de la capitale catalane, se pressent à l’entrée du Razz, usine désaffectée de l’ancien quartier industriel en pleine mutation, le Poble Nou. C’est un public au look soigné, rappelant la movida madrilène des années 1980 avec ses moustaches, ses chemises à carreaux et ses coiffures en forme de banane. Sur scène, Beth Ditto chante à en perdre haleine, comme si sa vie en dépendait. Elle enchaîne avec passion et révolte les morceaux du nouvel album de Gossip, « Music for men ». Il y a de l’énergie, de la chaleur mais aussi de l’émotion.

Cris et caresses vocales

Né en 1999 sur la côte Ouest des Etats Unis, à Olympia, une petite ville située à une heure de Portland, le trio Gossip a vraiment explosé en Europe en 2005 avec le tube générationnel « Standing in the way of control ». Porté par l’excentricité et la personnalité hors pair de Beth Dito, le groupe devient rapidement un phénomène dans toutes les grandes capitales européennes. Ancien groupe punk, Gossip mélange pèle mêle rock, funk, électro et disco. Si le dernier album « Standing in the way of control » sorti en 2006, semblait inachevé, de l’aveu même du groupe, « Music for men », sorti en juin 2009, est un véritable chef d’œuvre, aux accents rock et à l’énergie dancefloor. Un petit bijou tout droit sorti des années 1980. Enregistré dans le studio du légendaire producteur Rick Rubin (Beastie Boys, Red Hot Chili Peppers, Johnny Cash), l’album a été travaillé pendant 3 mois. Il dégage une énergie proche de celles des concerts du groupe. Dense, chaud, extrêmement puissant à l’image du single « Heavy Cross », Music for men est parfois un véritable brûlot musical à couper le souffle. On passe de l’énergique morceau « 8th wonder » à des titres où le groupe élargit ses influences, flirtant avec l’électronique (Pop goes the world) ou la pop (For Keeps ou 2012). La puissance vocale de Beth a été comparée à celles de légendes telles Janis Joplin, Aretha Franklin et Tina Turner, même si elle sonne de manière unique, entre cris et caresses.

Franche, révoltée et sexy, Beth Ditto est véritablement la figure emblématique et incontournable du groupe. Ultra féministe et grande gueule, la chanteuse assume avec plaisir ses presque 100 kilos. Inconnue aux Etats-Unis, star en Europe, elle n’a pas hésité à poser nue dans un magazine et se moque des codes. C’est le monde qui doit s’adapter à elle, pas l’inverse. Désignée par le prestigieux site web musical NME comme personnalité la plus cool de l’année 2008, Beth est devenu une icône de la mode.
Seul petit regret, l’absence de pause musicale dans Music for men. Il manque peut-être un morceau comme le mélancolique et sensuel « Coal To Diamonds » du précédent album. Cette fois-ci Beth Ditto n’était pas prête à ralentir le rythme. On ne s’en plaindra pas non plus.

« Music for men », Gossip – Sony 2009

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