La Clau
La querelle des anciens et des modernes, au MACBA de Barcelone

Si l’on essaie d’avoir une lecture linéaire de l’histoire de l’art, le passage à la modernité s’est déroulé au tournant du 19ème et du 20ème siècle. Selon les affinités et les préférences des historiens et théoriciens, un artiste ou un autre, un mouvement ou un autre, se voit assignée la haute responsabilité de ces bouleversements. Pour les peintres, on parle de Monet, ou de Matisse, ou de Picasso. Pour les artistes d’avant garde, c’est sans doute Dada, ou mieux encore Marcel Duchamp, dont le nom revient à foison dans les manuels d’histoire de l’art moderne et contemporain. Il y a sans doute une réalité bien plus complexe derrière tout cela, et, simplifiée à outrance, l’histoire de l’art devient une caricature. Néanmoins, il reste que les débuts du 20ème siècle ont vu une véritable explosion artistique, tous mouvements confondus, y compris en matière de musique, de cinéma, de photographie et de théâtre, dont nous sommes, comme le montre l’exposition barcelonaise, les innocents héritiers. Car l’essence même de ce qui a fait ce renouveau de l’art était la subversion. Les principaux artistes n’étaient plus des officiels, des représentants d’un Etat ou d’une Eglise. Ils étaient devenus au contraire des individus autonomes, singuliers, dont les principales qualités émanaient de l’expression d’une subjectivité qui faisait leur succès.

La subversion artistique est devenue académique

En réaction face à un art (réel ou imaginaire) qu’ils considéraient comme sclérosé, les artistes de la modernité ont su développer des systèmes comme autant de bouffées d’air frais. Maintenant ils sont exposés au panthéon des musées les plus officiels. La machine à fabriquer du contrôle et de la norme qu’est la société, comme l’a montré Foucault, a depuis longtemps digéré ces mouches du coche. L’urinoir de Duchamp est exposé partout (il en existe de nombreux exemplaires) et reproduit en cartes postales. Que l’artiste doive être un subversif et un novateur est devenu un cliché, attendu de tous et enseigné dans les écoles d’art : la modernité a été transformée en une académie. Dès lors, ce n’est sans doute pas là où on les attend que les artistes créent du nouveau. Ce n’est probablement pas ce à quoi l’on s’attend qui sera le plus intéressant. La modernité nous aura enseigné l’attention à la singularité, la nécessité de comprendre, et, plus que tout, la capacité qu’a l’art à se renouveler. Avant de partir pour le Musée d’Art Moderne de Varsovie, l’éclairage est fourni en Catalogne du Sud par Alice Creischer, Andrea Fraser, Dan Graham, Marine Hugonnier, Runa Islam, David Maljkovic, Gordon Matta-Clark, Florian Pumhösl, Martha Rosler et tant d’autres, sur une centaine d’œuvres.

Exposition « Modernologies »

MACBA, Plaça dels àngels, Barcelone. Metro L3 Liceu
Du 23 septembre 2009 au 17 janvier 2010.
Lundi, mercredi, jeudi, vendredi : de 11h à 19h30.
Samedi : 10h-20h
Dimanches et fériés : 10h-15 h
Fermé le mardi.

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