La Clau
La fête de Sant Jordi, locale à Perpignan, universelle à Barcelone

Instaurée en 1926 en pleine dictature espagnole de Primo de Rivera, la fête de la Sant Jordi, célébration conjointe du livre et de la rose, assurait alors une affirmation culturelle forte en Catalogne du Sud, dans une période d’éradication des symboles de la catalanité. Très loin de ces débuts héroïques, L’édition 2011, fêtée ce samedi, a suscité quelques inquiétudes chez les fleuristes et libraires sud-catalans. Ces craintes sont légitimées par un calendrier qui a situé cet événement annuel, pour la sixième fois en 85 ans, en pleine Semaine Sainte. En outre, une météo capricieuse et une cure d’austérité liée à la crise se sont invitées. Les professionnels s’attendaient à une légère baisse des ventes de livres, mais il n’en a rien été, et les festivités proposées dans toutes les communes d’importance, et même parfois dans les plus petites, ont permis à un public potentiel de 7,5 millions de Catalans de pouvoir acheter autour de 1,7 millions de livres.

Cette édition, qui n’a permis à aucun best-seller de sortir du lot, a donné l’opportunité de se faire connaître à des auteurs de langue catalane et espagnole, mais aussi du reste de l’Europe ou de l’Asie, traduits dans ces deux langues. Au final, le bilan présenté ce samedi à 19h par le « Gremi de llibreters » de Catalogne, corporation des libraires, faisait état de 19 millions d’euros de ventes de livres pour cette seule journée. La période pascale, qui attire de nombreux touristes en Catalogne, aura permis de braquer les projecteurs sur la Sant Jordi, une fête littéraire et populaire décidément unique au monde, devenue journée mondiale du livre et du droit d’auteurs depuis 1995, sous l’impulsion de l’Unesco. En Catalogne Nord, la Sant Jordi était présente depuis 1976, spécifiquement à Perpignan, où elle a pris de l’ampleur en 1994. Simultanément, la fête a séduit la plupart des villes et de nombreuses petites communes, mais elle ne parvient à y toucher l’universel. Au contraire, elle reste cantonnée à une fête de livre local, voire « de terroir », et reste dissociée de la grande littérature mondiale.

Partager

Icona de pantalla completa